La RSE est présentée comme une condition sine qua non de performance et mieux encore de pérennité des entreprises. Elle serait ainsi un enjeu stratégique pour toutes les entreprises quelle que soit leur taille. Mais qu’en est-il de la responsabilité sociale des entreprises familiales ?
Les entreprises familiales ont des caractéristiques spécifiques. Elles ont un actionnariat plutôt concentré entre les mains d’une famille, un portefeuille d’actions non diversifié (et donc l’entreprise est son principal patrimoine). La famille a également un horizon de décision à long terme (avec un objectif de transmission de l’entreprise) et elle est généralement impliquée dans la gestion de l’entreprise. Mais l’entreprise familiale n’est pas un groupe homogène et ses différentes caractéristiques peuvent varier d’une entreprise à l’autre. Quel est alors l’effet du contrôle familial sur l’engagement dans des activités socialement responsables? Et est-ce que cet effet dépend du degré d’implication de la famille dans l’entreprise ?
Nous avons mené une étude empirique dans le contexte français qui est caractérisé par une prédominance de ce type d’entreprises. Cette étude montre que l’effet du contrôle familial sur la RSE est hétérogène. En effet, les entreprises familiales s’engagent dans des activités RSE lorsque la famille est impliquée dans la gestion de l’entreprise et également, lorsque l’entreprise porte le nom de la famille (ce qu’on appelle une entreprise éponyme).
L’objectif de la famille est alors de renforcer sa richesse socio émotionnelle. Cependant, la performance RSE est plus faible lorsque les familles sont enracinées (c’est-à-dire lorsqu’elles détiennent plus de droit de vote que d’actions). Dans ce cas de figure, les entreprises familiales se préoccupent plus des objectifs financiers que de la préservation de leur richesse socio-émotionnelle. Et donc, un contrôle excessif de la famille peut menacer les intérêts des parties prenantes. Notre étude souligne également qu’un contrôle efficace par le conseil d’administration est susceptible de limiter certains comportements opportunistes des familles enracinées et d’améliorer la performance sociale.
Cet article contribue à la littérature existante en montrant que l’engagement RSE des entreprises familiales dépend du degré de leur implication selon des objectifs qui découlent soit de la théorie de l’agence soit de la théorie de la richesse socio-émotionnelle. Aussi, certaines caractéristiques du conseil d’administration renforcent l’efficacité du contrôle des familles.
Du point de vue des investisseurs, notre recherche permet de mieux comprendre le comportement RSE des entreprises familiales qui vise, selon l’implication de la famille, des objectifs financiers ou socio-émotionnels. Ces résultats interrogent aussi la nécessité de légiférer en matière RSE. Un pas en avant a été récemment réalisé par la loi Pacte en mai 2019 à travers la notion d’objet social de l’entreprise. L’objectif étant de placer la RSE au cœur de la stratégie de toutes les entreprises, on comprend les familiales aussi